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Bras de fer Etats-Unis-Chine autour de TikTok

La volonté de Donald Trump de bannir le réseau social des Etats-Unis remet en question un accord de vente entre ByteDance, propriétaire chinois de TikTok, et Microsoft

Une publicité pour Tik Tok dans le métro de New York, le 13 août 2019. — © imago images/Levine-Roberts
Une publicité pour Tik Tok dans le métro de New York, le 13 août 2019. — © imago images/Levine-Roberts

Qu’adviendra-t-il de TikTok aux Etats-Unis? Depuis que le président Donald Trump a annoncé vendredi soir son intention d’interdire l’applicationde partage de vidéos sur le sol américain, l’incertitude règne.

Le réseau social, propriété de l’entreprise chinoise ByteDance, réunit près d’un milliard d’utilisateurs à travers le monde et a vu sa notoriété renforcée pendant la pandémie de Covid-19. L’application est soupçonnée par Washington de fournir des données à Pékin, ce que ByteDance a toujours nié. Ce débat s’inscrit sur fond de guerre économique entre les Etats-Unis et la Chine.

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Négociations suspendues

Vendredi, la Maison-Blanche a d’abord fait savoir que le président allait signer un ordre officiel forçant l’entreprise à se séparer de la branche américaine de sa plateforme, au nom de la protection de la sécurité nationale. Dans la foulée, plusieurs médias américains ont révélé que Microsoft était en négociations avancées avec ByteDance pour racheter l’application.

Donald Trump a durci le ton dans la soirée, à bord de l’avion présidentiel, en annonçant un bannissement pur et simple de TikTok des Etats-Unis. Il a aussi précisé qu’il n’était pas favorable à une opération de rachat des activités américaines du réseau social par une société états-unienne.

En raison de ces déclarations, les négociations entre Microsoft et ByteDance étaient au point mort samedi, selon le Wall Street Journal. Le quotidien précise que les discussions auraient pu aboutir dès lundi, mais que les deux sociétés attendent désormais plus de clarté de la part de la Maison-Blanche. TikTok compte 1500 employés aux Etats-Unis. Le montant de la transaction pourrait atteindre 15 à 30 milliards de dollars, selon le Financial Times.

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Agenda caché

«Ça devient bizarre. Une vente à 100% à une entreprise américaine, qui aurait été considérée comme une solution radicale il y a deux semaines, permet de pallier les inquiétudes raisonnables sur la protection des données. Si la Maison-Blanche empêche cette vente, nous savons que ce n’est pas pour des raisons de sécurité nationale», a tweeté samedi Alex Stamos, ancien responsable de la sécurité chez Facebook et chercheur à l’Université Stanford.

«Les Etats-Unis seraient les grands perdants si TikTok était bannie», selon Daniel Castro, vice-président de l’Information Technology and Innovation Foundation, dont les vues sont généralement alignées sur celles des géants de la tech.

«Des millions d’Américains, y compris de nombreux supporters de Trump, l’utilisent pour créer et partager des contenus. Tous ses serveurs sont situés hors de Chine, et il n’y a aucune preuve qu’elle constitue une menace pour la sécurité nationale», a-t-il poursuivi.

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Liberté d’expression menacée

Après avoir été interdite en Inde à la fin de juin, aux côtés de 58 applications chinoises suspectées par les autorités de mettre en danger la sécurité du pays, TikTok a également interrompu son activité à Hongkong au début de juillet.

En cause: la récente loi sur la sécurité nationale imposée par la Chine, qui donne plus de pouvoirs à la police, notamment en matière de surveillance. Cela n’a pas suffi à rassurer Donald Trump, qui considère la plupart des réseaux sociaux biaisés en faveur des démocrates.

Lors d’un meeting de campagne républicain à Tulsa (Oklahoma) à la fin de juin, marqué par des rangées de sièges vides et la vidéo d’un Donald Trump visiblement dépité, des adolescents avaient proclamé sur TikTok qu’ils avaient commandé de nombreux billets d’entrée avec la ferme intention de ne pas y aller.

Jennifer Granick, conseillère en surveillance et cybersécurité au sein de l’organisation américaine de défense des droits civiques ACLU, juge quant à elle l’action de Donald Trump inappropriée: «Bannir une plateforme, même si c’était légalement possible, nuit à la liberté d’expression en ligne et ne fait rien pour résoudre le problème plus vaste de la surveillance gouvernementale non justifiée.»

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