Sabrina Scarna, avocate fiscaliste : "on paiera moins d'impôts cette année"

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© Peter Dazeley - Getty Images

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Par TDB

Quel est l’impact de la crise du coronavirus sur notre fiscalité? Allons-nous payer moins d’impôts cette année? Et quid pour l’an prochain, quelle sera la fiscalité "post-Covid "?

La déclaration d’impôts sur papier devait être envoyée pour ce mardi 30 juin. Tax-on-web, ce sera pour la mi-juillet

En 2019, les contribuables ont encore bénéficié des effets du tax shift, qui prévoit un allègement de la taxation sur le travail. De plus, cette année, la déclaration de revenus présente peu de changements par rapport à celle de 2019. C’est peut-être un avantage de l’impasse politique au niveau fédéral. En affaires courantes, le gouvernement n’a pris que très peu décisions en matière fiscale.

Cela se traduira donc encore dans notre déclaration 2020 selon Sabrina Scarna avocate fiscaliste chez Tetra Law Elle était l’invitée de Matin Première : "Cette année encore nous bénéficierons du tax shift, qui consiste à augmenter les bases d’imposition de base. Concrètement pour les ménages cela peut représenter un gain jusqu’à 170 euros pour une personne qui gagne 2000 euros. Malheureusement je crains que ça ne durera pas, mais le tax shift a amorcé la diminution de la taxation sur le travail et je crois qu’il faut continuer".

Un impôt sur les grosses fortunes? 

Le déficit budgétaire est abyssal. La relance s’annonce très compliquée avec une dépression de 10% du PIB : 50 milliards de création de richesse en moins. Où trouver l’argent ?

Comme à chaque fois l’idée d’une taxe sur les grosses fortunes fait son chemin, "on peut tout à fait envisager cette option mais il faudra offrir des garanties. Aujourd’hui, l’État belge doit être en mesure de dire qu’il va instaurer une taxe sur les plus fortunés, mais il faut expliquer que ce sera une taxe ponctuelle et expliquer concrètement les effets de cette taxation. Cet argent doit avoir un objectif et les autorités doivent être en mesure d’expliquer cet objectif" affirme l’avocate fiscaliste. En ce temps de crise il serait donc normal que les plus riches participent au redressement mais selon elle, ce doit être exceptionnel "il faut surtout expliquer l’utilité de cet impôt".

La disparition des voitures de société?

Chaque année la question des avantages liés aux voitures de société revient sur la table : "Vu le contexte environnemental il faut que ce tabou saute. Mais on ne peut pas le faire n’importe comment. Si notre système de voiture de société est presque unique en Europe c’est à cause de la charge sociale et fiscale sur les salaires. Aujourd’hui si vous retirez la voiture de société à certains ménages, alors ce sera une catastrophe. Ils n’auront pas les moyens de boucler le mois".

Si on veut arrêter la concurrence fiscale entre les États, alors il faut une solidarité entre ces États

L’argent pour affronter la crise économique qui s'annonce pourrait aussi provenir d’une taxe sur les multinationales :" c’est une idée, mais c’est très compliqué à mettre en œuvre. Parce qu’une taxe sur les GAFAM (les géants du web) implique qu’il ne faut pas le faire tout seul. Pour le faire il faut changer les paradigmes de la fiscalité internationale. Et si on veut arrêter la concurrence fiscale entre les États, alors il faut une solidarité entre ces États", selon Sabrina Scarna.

L'argent noir est-il vraiment noir? 

Pour sortir de la crise, chez nous, un des patrons du Fisc, Steven Vanden Berghe estime qu’il faut une nouvelle régularisation fiscale, car selon lui des milliards d’argent noir sont encore planqués sur des comptes en Belgique. Ce serait du "racket de l’État", explique Sabrina Scarna : " Comment savoir que c’est de l’argent noir ? Comment savoir que le commerçant lambda, que la profession libérale ou l’indépendant qui a déposé de l’argent sur son compte, comment savoir si c’est de l’argent parfaitement déclaré ou pas ? C’est lui qui va devoir amener la preuve de cela? Avec des années prescrites ? Et s’il n’arrive pas à prouver que ce n’est pas de l’argent noir, il va devoir payer".


►►► À lire aussi : Bruno Colmant, économiste, sur la crise du coronavirus : "On ne sort pas d'une crise par la taxation"


Sabrina Scarna ajoute que la lutte contre la fraude fiscale s’est améliorée ces 10 dernières années : "L’échange d’information s’est amélioré. Le Fisc aujourd’hui, il connaît toute votre situation, qu’elle soit belge ou qu’elle soit étrangère. Donc la fraude devient plus difficile ou certainement plus sophistiquée. L’Inspection spéciale des impôts fait bien son travail".

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