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En Afghanistan, un premier jour de trêve en vue de possibles pourparlers

Un cessez-le-feu de trois jours a été décrété entre les talibans et le gouvernement afghan à l’occasion de l’Aïd. Des négociations sont espérées. En dix-neuf ans de guerre seules deux autres trêves sont advenues précédemment, à la suite desquelles les talibans ont immédiatement repris les armes

D’anciens talibans déposent leurs armes lors d’une cérémonie de réconciliation le 27 juillet à Jalalabad. — © EPA/GUHLAMULLA HABIBI/Keystone
D’anciens talibans déposent leurs armes lors d’une cérémonie de réconciliation le 27 juillet à Jalalabad. — © EPA/GUHLAMULLA HABIBI/Keystone

Un cessez-le-feu de trois jours entre le gouvernement afghan et les talibans a débuté vendredi, rare moment de répit qui, beaucoup l’espèrent, pourrait mener à des pourparlers de paix historiques entre les deux camps.

La trêve, qui doit durer trois jours à l’occasion des fêtes de l’Aïd al-Adha, est la troisième en près de dix-neuf ans de guerre.

«Nous voulons un cessez-le-feu permanent de la part des talibans, car ils sont ceux qui permettent aux autres groupes terroristes d’opérer en Afghanistan», a déclaré à l’AFP Mohammad Tahir, chauffeur de taxi, après la prière de l’Aïd dans une mosquée de Kaboul.

«Opportunité historique»

Des centaines d’Afghans se sont rendus à la mosquée vendredi matin dans la capitale, où certains d’entre eux ont été contrôlés par des gardes pour limiter les risques d’attentat.

Si aucun combat n’a été signalé pour l’instant, le danger reste en effet une constante dans ce pays ravagé par la guerre depuis des décennies.

Quelques heures avant le début de cette trêve 17 personnes ont été tuées dans un attentat à la voiture piégée, triste rappel que la violence ne se limite pas au champ de bataille.

Lire aussi: Karim Pakzad: «La Russie ne veut pas d’une alliance entre Washington et les talibans»

Mais les habitants de Kaboul n’ont pas perdu espoir. «C’est une opportunité historique pour la paix – et personne ne devrait la gâcher», a déclaré à l’AFP Zemarai Sediqqi, un professeur de 26 ans. «J’ai grandi dans ce conflit, c’est assez. Maintenant c’est le moment pour une paix durable».

Le président afghan Ashraf Ghani et les talibans ont laissé entendre que les pourparlers pourraient débuter après l’Aïd.

Prisonniers «trop dangereux»

Ces négociations interafghanes devaient initialement se dérouler à partir du 10 mars, mais cette date a été dépassée en raison notamment d’une stagnation du processus d’échange des prisonniers, dont l’achèvement est exigé en tant que préalable par les rebelles.

Cette libération par les autorités afghanes de 5000 insurgés et par les talibans de 1000 membres des forces de sécurité, touche bientôt à sa fin. Les rebelles ont annoncé jeudi soir avoir fait leur part, avec un total de 1005 prisonniers libérés, alors que Kaboul a déjà relâché 4600 prisonniers.

Le chef d’Etat a répondu en annonçant vendredi la libération prochaine de 500 prisonniers talibans «pour montrer (sa) bonne volonté et accélérer les négociations de paix». Mais il a également alerté que certains des prisonniers dont les talibans demandent la libération sont trop dangereux pour être relâchés.

Un éditorial: Afghanistan: l’illusion d’une paix durable et inclusive

Les 500 insurgés qui seront libérés ne font pas partie de la liste transmise par les insurgés, a précisé le président. «Je n’ai pas le droit de décider de la libération de ces 400 prisonniers talibans qui sont accusés de crimes majeurs», a-t-il ajouté lors d’un discours à l’occasion de l’Aïd.

Trêves avortées

S’ils ont interrompu leurs attaques contre Washington depuis la signature de l’accord américano-taliban, les insurgés ont augmenté leurs violences contre les Afghans.

Selon Ashraf Ghani, plus de 3500 membres des forces afghanes et près de 800 civils ont été tués depuis l’accord.

Pour beaucoup d’Afghans, fatigués par ces violences sans fin, la trêve de trois jours n’est pas suffisante. «Nous voulons un cessez-le-feu permanent par les talibans pour ne plus voir un seul Afghan tué dans cette guerre», a déclaré à l’AFP Ahmad Jawed, un diplômé universitaire.

A la suite des deux précédentes trêves – en 2018 et en mai 2020 – les talibans étaient retournés immédiatement sur le champ de bataille.