Municipales: Macron se prononce contre l’interdiction des listes communautaires

Le président de la République a précisé qu'il dévoilerait de nouvelles mesures contre le communautarisme «dans les prochaines semaines».

C'est l'une des étapes clés de «l'acte II» du quinquennat. Accueilli un peu froidement au 102e Congrès des maires de France ce mardi - après s’être fait remarquer par son absence l’année dernière -, Emmanuel Macron a tenté de renouer le lien avec les maires en axant son discours sur le régalien.

Au menu, pendant près d’une heure et demie : «unité» de la République, laïcité, écologie et décentralisation. Il a par ailleurs promis que de nouvelles mesures contre le communautarisme arriveraient «dans les prochaines semaines», et s’est prononcé contre l’interdiction des listes communautaires. Tour d’horizon des moments forts du discours d’Emmanuel Macron.

● Contre l'interdiction des listes communautaires

Alors que le pays est traversé par un débat sur la laïcité depuis quelques semaines, le président de la République s'est prononcé contre l’interdiction des listes communautaires. «Je suis ouvert à la proposition mais il faut que cela respecte nos principes», a prévenu le chef de l’État devant l’assemblée des maires. «Je vous appelle collectivement à la prudence(…) Surtout il ne faut pas avoir quelque naïveté (…). Il ne s’agit pas de proclamer l’interdiction pour régler le problème», a insisté Emmanuel Macron en prenant l’exemple des listes antisémites. «Ce n’est pas en les supprimant que nous avons éradiqué ces idées», a-t-il déploré.

Plus que l’interdiction de telles listes, le président de la République pense que «ce qui compte c’est le combat politique. Ce qui compte c’est de faire tomber les masques». Selon lui, «ceux qui développent un islam politique se cachent, se dissimulent.» Aux maires, il a tenu a réaffirmer son soutien et la nécessité d’une collaboration mutuelle : «Je sais que je peux compter sur vous et que vous pouvez compter sur moi en acte. Les actes, c’est de fermer des associations par exemple.»

● Nouvelles mesures contre le communautarisme

S’adressant aux édiles, Emmanuel Macron les a appelés à «bâtir une société de vigilance» et leur a rappelé qu’ils étaient «souvent les mieux placés pour percevoir les signaux faibles». Visant «l’islam politique» et ceux qui ont «un projet de séparation d’avec la République», le chef de l’État a affirmé que le gouvernement porterait «des actions nouvelles concrètes dans les prochaines semaines». «États et communes sont les bras armés d’une République qui protège et s’impose dans chaque hall, dans chaque ville», a-t-il insisté, soulignant au passage le travail du ministre de l’Intérieur, Christophe Castaner, et du ministre de l’Éducation, Jean-Michel Blanquer. «12 lieux de cultes et 130 débits de boissons ont été fermés» dans la lutte contre le communautarisme, a rappelé Emmanuel Macron.

Sur la laïcité, après avoir un temps pensé à modifier la loi de 1905 pour l’adapter à un Islam de France, il s’est montré cette fois très clair. «La laïcité , c’est le cadre de la loi de 1905 complété par des lois plus récentes. C’est un cadre de liberté de respect, et de neutralité. Ce n’est pas un cadre de combat. Ce serait une faute lourde politique. Faisons appliquer et respecter ce cadre partout», a exhorté le président de la République. Mais il s’agit de «ne pas tout confondre». «On confond bien souvent la laïcité, la civilité et l’ordre public», a-t-il détaillé.

● «L'acte II» placé sous le signe des réformes

L’acte II est bien engagé avec des thèmes phares et Emmanuel Macron tenait à le réaffirmer devant les maires. Devenue une «priorité», la transition écologique passera par les maires. «L’acte II j’ai voulu le bâtir autour de quelques sujets où votre rôle est important. C’est dans les territoires et par les communes que la transition écologique se fait concrètement. L’état fixe un cadre, c’est aux communes de faire», a-t-il rappelé en adressant un message ferme aux maires qui prennent - en dehors de leur pouvoir de police - des arrêtés anti-pesticides. «Votre rôle en matière d’écologie ne doit pas vous conduire à prendre des décisions qui ne relèvent pas de votre pouvoir. J’en appelle à la modération», a-t-il demandé. Sur la loi d’économie circulaire portée par Brune Poirson - dont la mesure sur la consigne des bouteilles agace les maires -, il a toutefois rassuré les élus. «Concernant la consigne des bouteilles: rien ne sera fait sans l’accord des maires», temporise-t-il.

Sur la décentralisation, Emmanuel Macron ne s’est pas fait prolixe. Le débat de fond et les détails seront abordés après les municipales. Le chef de l’État a néanmoins ouvert la voie à ce que plus de pouvoir de police soit délégués aux maires. Il a refusé l’idée d’une décentralisation de la politique sociale au niveau départementale. «Oui à la décentralisation! Mais à la décentralisation où les compétences sont accompagnées d’une décentralisation claire des financements et des responsabilités qui vont avec», a averti le président Macron.

● La taxe d'habitation

Le président de la République et François Baroin se sont livrés un petit duel à distance dans un match de ping-pong verbal. François Baroin l’a d’abord interpellé sur le sujet le plus inflammable quelques minutes avant son discours. « La suppression de la taxe d’habitation est un fruit qui ne passe pas très bien. On l’a en travers de la gorge(…) Comme tous les chefs d’État, et vous n’êtes pas les premiers, vous avez décidé de supprimer un impôt qui ne vous appartient pas. Il n’y a pas de raisons que vous ayez un traitement de faveur», avait tonné le président de l’AMF dans un demi-sourire. Emmanuel Macron n’a pas tardé pour lui répondre par une citation de François Mitterrand. « Si j’avais voulu répondre sur ces propos point par point, j’aurais fait ministre», a-t-il souri. «C’est pour ça que je vous les envoie», a ajouté le président de la République. «Si durant votre campagne, beaucoup de vos électeurs vous reprochent la baisse (d’impôt)… Faites-le moi savoir! Et qu’ils viennent se plaindre! Et parfois, peut-être, vous aurez le droit d’empocher les félicitations qu’ils vous livrent à vous et pas au gouvernement», a lancé, sur le ton de la boutade, Emmanuel Macron.