Quand un végétal en remplace un autreAlice Pauli plante un nouvel arbre de Penone
La galeriste lausannoise n’a pas supporté longtemps le vide laissé dans son jardin par la sculpture qui trône depuis avril 2019 à l’entrée du Musée cantonal des beaux-arts. Elle en a recommandé une nouvelle.
L’histoire est digne du pays des merveilles et ce n’est sans doute pas pour rien qu’Alice Pauli porte si bien le prénom de l’héroïne de Lewis Carroll. Mais l’histoire est surtout bien réelle! On est en avril 2019, le Musée cantonal des beaux-arts voit le bout du chantier et déballe sa première œuvre. Cadeau. «Vous êtes contents, elle a trouvé sa place, non?»
«En ouvrant ma fenêtre, c’était «Luce e ombra» que je voyais en premier. Maintenant, j’y pense tous les jours face au vide»
Alice Pauli est alors tout à son bonheur de collectionneuse qui partage avec le plus grand nombre, elle veut savoir, connaître l’avis de tous et de l’artiste en particulier. Mais elle ressent aussi des pincements au cœur et ne s’en cache pas. La sculpture de Giuseppe Penone lui manque. Chez elle. Dans son jardin. Elle a toujours su la pièce en partance, puis qu’elle l’avait voulu ainsi, mais le temps de la réalisation du MCBA lui a laissé celui de mesurer son attachement à cet arbre dont la force d’attraction s’étend de la terre au ciel, à cet art de l’Italien, figure essentielle de la scène contemporaine, qui révèle le souffle mystique de la nature et capte les vibrations du monde. «En ouvrant ma fenêtre, confiait-elle alors, c’était «Luce e ombra» que je voyais en premier. Maintenant, j’y pense tous les jours face au vide.»
Des idées qui essaiment dans le monde
Ce vide devenu difficile à vivre, la collectionneuse, 98 ans cette année, n’a pas hésité longtemps: elle a passé commande d’une nouvelle pièce et début juillet, Giuseppe Penone qui réinvente le motif dans la continuité est arrivé avec «Idee di pietra», une pièce de dix mètres de haut. Considérant l’arbre comme un être de mémoire qui retient sa forme et s’en sert pour sculpter sa propre existence, l’artiste trace et explore cette régénérescence. Philosophe. En même temps qu’observateur admiratif de ces troncs – nourris à la fois par la force de la gravité et l’énergie de la lumière – qui ne plient pas sous la pression des directions opposées.
De pierre et de bronze, ses «Idee di pietra» essaiment un peu partout dans le monde, Kassel en Allemagne pour la Documenta, Gstaad pour une installation de la galerie Gagosian, devant l’Ermitage à Saint-Pétersbourg ou à Versailles pour des expositions. Comme à Chicago, au château de Chaumont sur Loire, et désormais à Lausanne entouré de pièces d’autres artistes.
Alice Pauli n’en dira pas davantage avec des mots – réserve de galeriste oblige – mais la collectionneuse l’exprime avec des yeux brillants d’une lumière qui ne trompe pas. Penone, elle adore! Reconnaissante de cet art de la trace qui inspire et qui accompagne la vie.
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