Un chauffard renverse une femme et la laisse pour morte, il est retrouvé au Portugal après 6 semaines de cavale

Après un gravissime accident de la circulation à Saint-Mandrier, en juin 2018, une femme qui faisait du jogging avait été laissée gisante au sol. Un motard s’était enfui… jusqu’au Portugal.

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So.B. Publié le 23/08/2019 à 18:29, mis à jour le 23/08/2019 à 21:04
Illustration. Photo F.V.

Il est des mots d’excuses qui semblent épouvantables. Ceux-ci ont traversé l’audience correctionnelle ce jeudi matin à Toulon, portés par la voix d’un homme qui n’a jamais réussi à exprimer sa compassion. "Je regrette cet accident, croyez-moi. Ma vie aussi est brisée."

Skipper de profession, ce Mandréen avait laissé une femme inconsciente au sol, sa tête sous la roue de la grosse cylindrée qu’il conduisait, prenant la fuite à pied et repoussant un témoin qui tentait de l’empêcher de partir.

Celle qui est brisée, littéralement brisée, est une mère de famille. Dans tout son corps et dans toute sa chair. Avec onze mois d’ITT.

Lui est maladroit jusqu’au bout: "J’ai eu peur qu’elle décède, j’aurais eu une mort sur la conscience. Je connais Saint-Mandrier, j’ai honte."

Meurtrier de la route

Détenu depuis son arrestation au Portugal, Jean-Daniel Levan, 43 ans, a vu les menottes se refermer sur ses poignets, à la fin de l’audience. Condamné à une peine de quatre ans de prison ferme.

Pourtant, "aujourd’hui, c’est la première fois que [le prévenu] dit un mot concernant la situation de la victime", a remarqué le procureur de la République adjoint, Jean-Jacques Gauthier. Tout en fustigeant son comportement de "meurtrier de la route", qui pilotait "une moto de course, pas une moto ordinaire - il faut se figurer la bombe qu’elle représente". Il était sans permis valide et sans assurance.

Après l’accident, Jean-Daniel Levan n’avait pas appelé les secours. "Excusez du peu, on parle d’un capitaine de bateau, censé être le dernier à partir, d’un secouriste aussi, d’un homme responsable."

Avec de l’argent liquide, il a acheté un van. Une semaine après l’accident, déjouant la police qui le cherchait, il prenait le départ pour le Portugal, en désactivant son téléphone. Pour le ministère public, "il a réagi en Pablo Escobar, il s’est taillé".

Clandestinité

"On a quand même l’impression que vous avez organisé votre clandestinité, tonne la présidente du tribunal, Patricia Krummenacker. Plusieurs équipes de policiers ont été mobilisées pour vous retrouver." Il a fallu délivrer un mandat d’arrêt européen pour qu’il soit intercepté par les autorités portugaises puis écroué en France le 10 août, après six semaines de cavale.

La responsabilité de Jean-Daniel Levan n’a fait aucun doute, tant les circonstances de l’accident du 29 juin 2018 à Saint-Mandrier sont accablantes.

À moto, dans une courbe marquée par une ligne blanche, il double une voiture qui ralentit devant lui. "Les circonstances, c’est que je suis surpris, expose-t-il. Je la vois (la joggeuse) en arrivant à mi-hauteur de la portière de la voiture. Je freine. Je ne m’attends pas à la voir"

Il freine beaucoup trop tard, pour une vitesse forcement excessive, dans une zone limitée à 30 km/h, où la moto était "inclinée", comme sur un circuit.

Il y a deux collisions. La première sur l’avant d’une autre voiture qui arrivait en face. La seconde a emporté le corps de la victime et l’a traîné sur une vingtaine de mètres.

Il "connaît l’endroit", situé près de chez lui, et avoue avoir été "peu attentif".

Souffle de vie

Dans une audience pesante, le souffle de vie est paradoxalement venu de la victime. Celle qui a failli mourir. Celle dont la colonne vertébrale aurait pu subir des dommages irréversibles, "à un millimètre près, sur la C1 (la première des cervicales, Ndlr)".

Se tenant debout et marchant normalement aujourd’hui, elle témoigne de son calvaire, avec une émotion qui remplit la salle.

De multiples lésions à la tête, avec un hématome au cerveau, l’ont plongée dans le coma plusieurs jours. Elle n’a retrouvé la parole qu’au bout de deux semaines, mais était incapable de donner le nom de son mari.

"Puis, j’ai commencé à me reconnecter", décrit-elle. Cinq fractures du bassin la clouent allongée, un corset lui tient jusqu’à la tête. Mais elle "transpire l’envie de s’en sortir". Les médecins n’en reviennent pas de ses progrès. "Je suis très heureuse d’être là. D’être vivante." Son avocate Me Laure Bret insiste sur "les séquelles cognitives importantes, le handicap invisible, le calvaire qui n’est pas terminé".

Et les souffrances de toute une famille autour d’elle. Le soir du 29 juin, sa fille de 13 ans n’a jamais vu revenir sa mère.

En défense, Me François-Xavier Kozan a reconnu que "la robe (d’avocat) est parfois lourde à porter". À l’heure où "l’expression d’un profil de personnalité" dessert un homme solitaire qui "semble déconnecté de la réalité". Réalité qui l’a rattrapé, sans que ses yeux ne quittent un insondable regard. Fermé. Ou déjà enfermé.

Son permis de conduire est annulé pour 5 ans, sa moto est confisquée.

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