Publicité

Procès du «commando de Notre-Dame»: lourdes peines contre les femmes jihadistes

Des peines de 5 à 30 ans de prison ont été prononcées lundi à Paris contre les femmes qui avaient tenter de faire exploser une voiture pleine de bonbonnes de gaz près de la cathédrale Notre-Dame de Paris en 2016

Inès Madani à la barre, le 11 avril 2019. — © AFP
Inès Madani à la barre, le 11 avril 2019. — © AFP

Deux femmes jihadistes qui avaient tenté de faire exploser une voiture pleine de bonbonnes de gaz non loin de la cathédrale Notre-Dame de Paris en 2016 ont été condamnées lundi 14 octobre à 25 et 30 ans de prison.Inès Madani et Ornella Gilligman étaient jugées en même temps que trois autres femmes, dont deux ont été condamnées à 20 ans de prison et une à 5 ans. Ce groupe de femmes, aujourd'hui âgées de 22 à 42 ans, était devenu «le visage du jihad au féminin» en France, selon l'expression des avocats généraux.

Lire aussi:  Tuerie à Paris: la piste de la radicalisation privilégiée

Ornella Gilligmann, mère de trois enfants, condamnée à 25 ans, est tombée en larmes dans le box à l'énoncé du verdict. Inès Madani, condamnée à 30 ans, est restée presque impassible. «Elle est sonnée», a déclaré devant les journalistes son avocat Laurent Pasquet-Marinacce. «C'est une peine excessivement sévère.» «C'est une décision qui est là pour faire un exemple, qui est déconnectée de la personnalité de cette jeune femme et de la gravité des faits, il n'y a pas eu de mort, pas de blessé», a dit l'avocat, pour qui la question d'un appel se pose «évidemment».

Les condamnations prononcées par la cour d'assises spéciale de Paris, composée uniquement de magistrats professionnels, correspondent aux réquisitions du parquet. Quatre des cinq femmes encouraient la perpétuité. Elles étaient accusées d'avoir voulu mener des attaques terroristes en suivant les consignes de Rachid Kassim, un propagandiste du groupe Etat islamique (EI) probablement mort par la suite en Irak.

«Un carnage» évité

Inès Madani et Ornella Gilligmann ont tenté de faire exploser une voiture remplie de bonbonnes de gaz dans la nuit du 3 au 4 septembre 2016 devant des restaurants situés non loin de la cathédrale Notre-Dame, en tentant de l'incendier avec du gasoil. Seul le choix de ce carburant, impossible à enflammer, a permis d'éviter l'explosion. Selon les magistrats instructeurs, le mode opératoire «augurait d'un carnage».Après l'attentat manqué, Ornella Gilligmann est arrêtée dans le sud de la France le 6 septembre alors qu'elle tente de prendre la fuite, tandis qu'Inès Madani, suivant les conseils de Rachid Kassim, se rend chez une autre femme, Amel Sakaou. Ces deux femmes sont rejointes par Sarah Hervouët, elle aussi guidée par le jihadiste sur des messageries cryptées. Le 8 septembre, se sachant traquées par la police, elles quittent l'appartement armées de couteaux de cuisine. Sur le parking, Sarah Hervouët porte un coup de couteau à un policier en civil qui se trouve dans une camionnette. Inès Madani est blessée aux jambes par les tirs d'un policier.Sarah Hervouët a été condamnée à 20 ans, tout comme Amel Sakaou, qui a refusé d'assister au procès tout au long des trois semaines d'audience. Samia Chalel, accusée d'avoir aidé Inès Madani à trouver un refuge après l'attentat raté, a été condamnée à cinq ans de prison dont un avec sursis. La jeune femme a été la seule à accueillir ce verdict avec le sourire.

«Volonté de tuer»

«J'ai eu le pire des comportements», avait déclaré Inès Madani lundi matin avant le verdict. «Je n'avais que des projets de mort à l'époque. Aujourd'hui, j'ai des projets de vie.» Ornella Gilligmann avait elle aussi confié sa «honte». «Je demande pardon et je demanderai pardon toute ma vie à tous ceux qui ont été victimes du terrorisme», avait-elle dit d'une voix émue.

Les avocats généraux avaient réclamé de 10 à 30 ans de réclusion criminelle à l'encontre des cinq protagonistes de cette affaire qui a révélé le rôle actif de femmes dans le jihad, prêtes à commettre une attaque meurtrière à défaut de partir en Syrie ou en Irak, alors que la France est visée depuis 2015 par une vague d'attentats islamistes sans précédent qui a fait 255 morts.Ces femmes ont été «le bras armé» en France du groupe Etat islamique, a déclaré dans son réquisitoire l'une des deux avocats généraux. «Elles étaient animées» par une «volonté de tuer» et ont preuve d'une «détermination sans faille». Une lecture des faits contestée par les avocats d'Inès Madani. Les accusées ont fait preuve d'une «improvisation constante», a estimé Me Pasquet-Marinacce, en insistant sur la fragilité psychologique de sa cliente. Inès Madani avait déjà été condamnée en avril à huit ans de prison pour des faits plus anciens qui avaient révélé son rôle de mentor auprès d'aspirants jihadistes.