L’histoire médicale montre que seuls 10% des essais débouchent sur un vaccin efficace. Un pays qui préempterait les recherches d’un laboratoire de manière exclusive pourrait faire une très bonne affaire – c’est le pari qu’ont fait les Etats-Unis, la Chine, la Russie ou encore l’Europe. Mais il y a neuf chances sur dix qu’il s’en morde les doigts. Second argument froid et rationnel: une pandémie jugulée dans un pays grâce à une percée scientifique serait une bonne nouvelle, mais à quoi cela lui servirait-il si ses partenaires commerciaux étaient encore à l’arrêt? La reprise tant espérée aurait-elle lieu dans une économie mondiale si imbriquée?
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C’est là qu’intervient l’initiative Covax lancée par l’Organisation mondiale de la santé, Gavi (Alliance du vaccin) et la CEPI (Coalition pour les innovations en matière de préparation aux épidémies). L’idée est simple: convaincre les Etats riches qu’il vaut mieux mutualiser les risques. Si leur tentative individuelle échoue, ils bénéficieront d’une réussite ailleurs, tout en garantissant aux Etats pauvres un accès équitable. Plus de 70 nations ont exprimé leur intérêt pour cette initiative dont la Suisse peut, à juste titre, s’enorgueillir d’assurer la coprésidence. Et face à des capacités de production insuffisantes pour vacciner d’un coup toute l’humanité, les promoteurs de Covax osent, là encore, une approche froide et rationnelle: cibler successivement le personnel soignant, les groupes à risques, les populations des zones où la pandémie est la plus active et, enfin, le reste d’entre nous. La course au vaccin n’est pas encore gagnée, mais elle nous enseigne déjà que notre instinct de survie n’est pas toujours le meilleur conseiller.