Partager
Nature & environnement

Des îles incubateurs : une utopie artificielle en Polynésie Française

Créer un archipel artificiel écologique en Polynésie Française pour tester de nouveaux modèles de gouvernance et promouvoir l'innovation dans les technologies numériques et marines, c’est le projet du Seasteading Institute.

réagir
iles artificielles seasteading

Exemple de design d'îles artificielles du Seasteading Institute

Seasteading Desltasync

Lorsqu'on imagine un archipel artificiel en Polynésie Française, on pense vacances, paradis, tourisme... Mais beaucoup moins à un test de nouveaux modèles de "gouvernance et promotion de l'innovation dans les technologies numériques et marines". C’est pourtant le projet un peu fou mais réel du Seasteading Institute. Un article publié dans Nature annonce que le gouvernement polynésien a officiellement signé un accord historique pour coopérer à la création d'un cadre juridique permettant le développement de ce projet hors du commun.

Un projet aux innombrables objectifs

Le Seasteading Institute, à but non lucratif, a été fondé en 2008 par Patri Friedman, ancien ingénieur de Google. Avec une nouvelle entreprise à but lucratif, Blue Frontiers, ils ont signé un protocole d'accord avec le gouvernement de la Polynésie Française en janvier 2017 qui jette les bases de la construction de leur prototype : trois quarts d'hectare de plates-formes flottantes écologiques dans un lagon de Polynésie française.

Si l'équipe réussit, la vision pourrait devenir réalité d'ici 2020. Mais ce serait juste le premier pas, d'après Joe Quirk, l'un des cinq directeurs généraux de l'entreprise à l'origine du projet. L'objectif ultime est en effet de construire des nations souveraines entières sur les mers ouvertes, composées d'unités flottantes modulaires.

Concrètement, ces archipels artificiels bénéficieraient de leur propre gouvernance et d'une réglementation spécifique, notamment économique. L'objectif du projet est multiple, au point qu'on ne sait plus où donner de la tête : ce serait l'occasion de tester différents modes de gouvernance, expérimenter des technologies durables (dessalement, énergies renouvelables, production alimentaire flottante), mais aussi constituer des stations maritimes scientifiques. Voire même servir de radeaux de sauvetage aux populations côtières déplacées par l'élévation du niveau de la mer. A l'avenir, l'entreprise espère générer des revenus en louant de l'espace sur l'île et en agissant comme consultants pour d'autres constructeurs potentiels.

Un défi financier, conceptuel et territorial

L’apparence de l'île prototype est également un élément clé de la stratégie de relations publiques de Blue Frontiers : "Nous travaillons avec des designers tahitiens pour créer quelque chose qui ne ressemble pas à une invasion extraterrestre", explique Bart Roeffen, de l’entreprise de design Blue21. Il envisage notamment de s'inspirer de la construction navale polynésienne. Les îles devront également être écologiques et durables : elles seront constituées de plates-formes liées disposées de telle manière qu'aucun corail en dessous ne soit complètement ombragé et tué.

L'équipe doit convaincre les habitants de la Polynésie française que les îles artificielles leur seront bénéfiques et réunir suffisamment d'argent pour construire le prototype qui, selon ses estimations, coûtera jusqu'à 60 millions de dollars. Cette tâche incombera principalement à Marc Collins, un des directeurs généraux de Blue Frontiers. Tahitien, il a vécu dans la Silicon Valley dont il a adopté la culture de course aux grandes idées et a servi en tant que ministre du tourisme de la Polynésie française en 2007 et 2008.

La prochaine étape pour faire de l'île une réalité sera l'adoption d'une loi définissant la « zone économique spéciale » qui couvrira l'île synthétique. Blue Frontiers ne demande à la Polynésie Française aucune subvention pour construire l'île, mais requiert un taux d'imposition de 0 %, entre autres exceptions réglementaires. L'équipe espère voir un projet de loi émerger avant la fin de l'année. Si d’aventure ce projet aux accents utopistes voit le jour, le temps nous dira si les îles artificielles serviront bien de refuge pour les Polynésiens face à la montée des eaux et d’incubateur scientifique et politique… ou plus simplement un repère de riches étrangers cherchant à échapper aux réglementations gênantes.

Commenter Commenter
à la une cette semaine

Centre de préférence
de vos alertes infos

Vos préférences ont bien été enregistrées.

Si vous souhaitez modifier vos centres d'intérêt, vous pouvez à tout moment cliquer sur le lien Notifications, présent en pied de toutes les pages du site.

Vous vous êtes inscrit pour recevoir l’actualité en direct, qu’est-ce qui vous intéresse?

Je souhaite recevoir toutes les alertes infos de la rédaction de Sciences et Avenir

Je souhaite recevoir uniquement les alertes infos parmi les thématiques suivantes :

Santé
Nature
Archéo
Espace
Animaux
Je ne souhaite plus recevoir de notifications