Changement de stratégie pour Donald Trump qui appelle désormais au Sénat à une abrogation immédiate de l’Obamacare, la loi sur l’assurance santé, signée par Barack Obama en 2010, plutôt qu’à une réforme du texte. L’Obamacare a permis à 20 millions d’Américains d’être assurés et a permis aux personnes ayant des antécédents médicaux de ne plus se voir opposer un refus.

« À part ce vote pour une abrogation sèche sans remplacement, le président n’a pas de bonne option de sortie. Aujourd’hui Trump est plutôt dans la minimisation de l’impact politique plutôt que la recherche d’une nouvelle réforme », analyse Corentin Sellin, professeur agrégé d’histoire, spécialiste des États-Unis.

Au Sénat, Jerry Moran (Kansas) et Mike Lee (Utah), ont annoncé lundi 17 juillet qu’ils voteraient contre le projet de réforme du système de santé, élaboré par les chefs de la majorité. « Les républicains devraient juste abroger l’Obamacare maintenant et repartir de zéro pour élaborer un nouveau plan sur la santé. Les démocrates se joindront à eux ! » a écrit Donald Trump sur son compte Twitter en réaction à la défection de ces deux sénateurs conservateurs supplémentaires.

« Très difficile de voter pour la réduction du nombre d’assurés santé »

« Pour ces deux personnages, il y a encore trop d’impôts, trop de régulations, de bureaucratie d’État. Ils veulent une assurance maladie confiée aux seuls marchés privés. Le texte de Donald Trump est un texte de compromis qui n’allait pas assez loin », analyse Corentin Sellin.

Ces deux sénateurs rejoignent l’opposition manifestée par Rand Paul (Kentucky) et Susan Collins (Maine), Républicains considérés comme plus modérés.

« La critique des sénateurs modérés comme Susan Collins est de dire que le texte de Trump allait supprimer la couverture maladie à 15 millions d’assurés. Cela va toucher beaucoup d’électeurs de la working class. Il est très difficile de voter pour la réduction du nombre d’assurés santé alors que ces républicains jouent leur réélection en 2018 », poursuit Corentin Sellin.

« La dernière cartouche de Donald Trump »

Le nombre de sénateurs de la majorité, opposés à la nouvelle mouture de la loi, s’élève à quatre alors que les républicains disposent d’une courte majorité sur les démocrates (52-48).

« C’est un peu la dernière cartouche de Donald Trump. L’abrogation pure et simple lui permet de dégager sa responsabilité, de dire que des sénateurs républicains ont trahi l’idée conservatrice. En 2015, la majorité républicaine au Sénat, alors dans l’opposition, avait voté cette abrogation. Aujourd’hui, cela permet à Donald Trump de mettre les républicains au pied du mur », dit encore Corentin Sellin.

La majorité conservatrice à la Chambre des représentants, moins étroite qu’au Sénat, avait voté, en mai, par 217 voix contre 213 pour l’abrogation de l’Obamacare et son remplacement partiel par l’adoption de l’American Health Care Act (AHCA). Le texte était passé à une voix près, après un premier échec.

L’Obamacare n’a jamais été aussi populaire : 50 % des Américains la soutiennent contre 24 % pour la réforme de Donald Trump, selon le Washington Post.

« Tout le problème de Donald Trump est qu’il a promis d’abroger l’Obamacare, mais il affirmait pouvoir offrir une assurance maladie bien meilleure avec des coûts bien moindres, soit deux choses impossibles », poursuit l’historien.