TRIBUNE. L’annonce de la suppression de la Cour de justice de la République (CJR) est une bonne nouvelle et un signal longtemps attendu d’une sortie de la logique des immunités diverses, que l’on applique à certains responsables politiques, au nom d’une conception erronée et veillotte de la séparation des pouvoirs. C’est une réforme importante au plan des symboles mais, il faut bien le reconnaître, de portée relativement limitée en ce qui concerne le nombre d’actes concernés.
De plus, cette suppression va poser la question de la juridiction de remplacement car il n’est pas certain que le droit commun donne au juge pénal une compétence générale pour tous les actes de gestion des élus qui relevaient auparavant de la CJR et il n’est pas certain que le juge pénal soit le mieux placé pour réprimer certains actes de mauvaise utilisation de l’argent public.
Il ne faut donc pas s’arrêter en si bon chemin. Le gouvernement doit profiter de la loi qui va être discutée pour supprimer de notre dispositif législatif une autre aberration ancienne, qui n’est plus justifiée aujourd’hui. Une réforme qui toucherait la vie quotidienne de nos concitoyens et qui pourrait avoir une grande portée si on considère le nombre d’actes de gestion potentiellement concernés.
Supprimer l’immunité des gestionnaires publics
En application de l’article L312-1 du code des juridictions financières, tous les agents publics susceptibles d’avoir ordonné irrégulièrement des dépenses sont justiciables devant une juridiction de droit commun spécialisée, la Cour de discipline budgétaire et financière (CDBF).
Mais cette justice ne s’applique pas à tous. Le deuxième paragraphe du même article prévoit que les membres du gouvernement et les présidents des exécutifs locaux lui échappent pour les actes accomplis dans l’exercice de leurs fonctions. Il s’agit donc bien d’une immunité de juridiction dont bénéficient les ministres, les maires et les présidents de collectivité locale. Elle est d’autant plus anachronique, en ce qui concerne les exécutifs locaux, que le mouvement de décentralisation a considérablement accru, depuis plus de trente ans, le montant des fonds publics qu’ils gèrent sans que la loi ne se soit adaptée à cette situation.
Même si, dans leur immense majorité, ces gestionnaires publics font preuve de rigueur, d’honnêteté et d’efficacité, et surtout pour cette raison, la moralisation de la vie publique passe aussi par la suppression de leur immunité en ce qui concerne la gestion de l’argent public. Il ne s’agit en somme que de mettre sur un pied d’égalité les élus et les fonctionnaires qui les servent.
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