Quand l’école redonne aux enfants le goût d’écrire… ensemble

éducation Les enseignants investissent à leur tour le collaboratif grâce aux outils d’écriture numérique...

Adèle Bertier
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Peetch est une plateforme d'écriture collaborative destinée aux 7-15 ans.
Peetch est une plateforme d'écriture collaborative destinée aux 7-15 ans. —

Souvenez-vous des cadavres exquis entre camarades sur les bancs de l’école… Les enseignants réinventent aujourd’hui l’exercice à la sauce numérique. Il y a un an et demi, François Jourdain, à l’époque instituteur à Tours, repère sur les réseaux sociaux Peetch, une jeune pousse qui propose d’écrire à plusieurs mains grâce à son interface. «Je trouvais ça original, c’était vraiment ce que je recherchais», se rappelle ce passionné du numérique. Le projet d’Elisa Hauet, 31 ans, et sa bande d’amis se retrouve bousculé. «A l’origine, l’idée était de créer le cadavre exquis 2.0, de s’amuser à écrire des histoires à plusieurs sur son smartphone. Il n’y avait pas de visée éducative.»

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Après avoir testé le concept avec la classe de François Jourdain, Peetch décide de se concentrer sur l’écriture collaborative pour les 7-15 ans. «Chaque jour, 8 à 10 enseignants s’inscrivent sur notre plateforme», explique Elisa Hauet. En deux ans, Peetch a déjà réuni quelque 1.000  instituteurs dans 40 pays à travers le monde. Etablissements de Zones d’éducation prioritaire (Zep), écoles privées ou publiques, villes et villages… Peetch est sur tous les fronts de l’éducation. Sa plus grosse communauté d’utilisateurs se trouve en France et au Canada. La start-up dispose d’ailleurs d’un bureau à Montréal.

«Le Canada est particulièrement en avance sur les outils numériques à l’école», remarque comme Romance Cornet, institutrice adepte des méthodes collaboratives. Dans son école de Champagneux, petit village de moins de 1.000 habitants en Savoie, cette institutrice fait travailler ses élèves de CM1 et CM2 sur des «twittcontes» dont le principe consiste à écrire une histoire à plusieurs mains via des tweets de 140 signes.

 #Twittcontes : l’écriture collaborative d’un conte sur #Twitter > https://t.co/HKCO9r2w5f pic.twitter.com/SI8bd6Ams3
— VousNousIls.fr (@vousnousils) 9 février 2016



Il y a deux ans, elle a fait participer des élèves canadiens à un projet de création de conte avec sa classe «pour aller au-delà d’une correspondance classique entre élèves de pays différents», explique-t-elle. Ce «voyage à travers le numérique», comme se plaît à le qualifier l’institutrice, a obligé les élèves à organiser leurs pensées et à travailler collectivement malgré les milliers de kilomètres qui les séparaient, «sans que ce soit une contrainte, mais un défi», explique Romance Cornet.

«Les élèves apprennent à coopérer»

Les élèves apprennent à structurer leur récit sur Peetch. Crédit: Peetch

L’engouement est le même du côté de François Jourdain qui était à l’initiative d’une «twittclasse» avant de découvrir Peetch. Le professeur a été particulièrement marqué par l’enthousiasme de ses élèves à l’idée d’écrire à plusieurs mains derrière l’écran. «Les élèves étaient fans. Tous les jours je prenais un temps pour établir le planning et j’entendais derrière moi: "Est-ce qu’on va faire Peetch?"» Pour les professeurs, l’outil collaboratif favorise l’écoute et le respect de l’autre. «Avant de tweeter, les enfants proposent des idées par groupe, puis on sélectionne les meilleures phrases, on se met d’accord. Les élèves apprennent à coopérer», explique Romance Cornet, qui espère utiliser Peetch dès la rentrée prochaine. «On apprend à se respecter soi-même en n’écrivant pas n’importe quoi et à respecter les écrits des autres. En fait, on apprend à vivre ensemble», ajoute François Jourdain.

Des freins au collaboratif à l'école

Malgré «une grande volonté des enseignants d’aller vers le numérique», selon la cofondatrice de Peetch, ces plateformes collaboratives sont encore loin de susciter l’engouement de tous. François Jourdain, qui anime une formation aux outils numériques dans son école primaire de Tours, rencontre des instituteurs qui pointent le manque d’équipement pour mettre en place ces projets collaboratifs. Il considère l’excuse un peu facile. «Quand on présente des projets intéressants, on est soutenu et on trouve le matériel.»

Dans le cas contraire, les enfants pourraient à l’avenir utiliser Peetch au-delà des murs de l’école. «Je rencontre plein de parents qui me disent que l’école de leurs enfants n’est pas suffisamment équipée en ordinateurs et qui veulent utiliser Peetch de chez eux», explique Elisa Hauet. La cofondatrice s’est laissée convaincre et va prochainement ouvrir la plateforme à tous les profils. Au risque de voir s’estomper l’esprit collaboratif de Peetch.

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