Il a été préparé par un groupe de travail animé par Jean-Marie Brom, physicien au CNRS, et Anne Henry, ingénieure de recherche chez EDF.
Il a été rendu public à l'occasion de la journée de l'écologie de la France insoumise organisée le samedi 25 février 2017.
AG TWEED-H2O : Acteurs, projets et ecosystemes des secteurs de l'energie et d...
Livret 100% énergies renouvelables
1. Les livrets de la France insoumise #15 ÉNERGIE
ÉNERGIES
RENOUVELABLES100%
2. Ce livret
a été rédigé
par un groupe de
travail coordonné
par Jean-Marie Brom,
physicien et directeur
de recherche au CNRS et
Anne Henry, ingénieure
dans l’énergie et
syndicaliste.
Il complète L’Avenir en
commun (édition Le Seuil,
2016, 3€), le programme
de la France insoumise et
de son candidat
Jean-Luc Mélenchon.
6. 6
Notre constat : l’urgence climatique est énergétique
L
a crise écologique
que nous traversons
aujourd’hui est double
La crise climatique due à une consommation effrénée
d’énergies émettrices de gaz à effet de serre pour satisfaire
les besoins des pays les plus riches au détriment des autres
s’accompagne d’une crise énergétique due à l’épuisement
inéluctable des ressources non renouvelables que sont le
charbon, le pétrole, le gaz, mais aussi l’uranium.
La consommation d’énergie croît de façon exponentielle : elle a plus que doublé
depuis 1973 et son évolution suit celle des produits intérieurs bruts. Cette situation
ne pourra pas durer : plus de 80 % de l’énergie consommée vient de sources non
renouvelables (charbon : 20 % ; pétrole : 41 % ; gaz naturel : 20 % ; nucléaire : 2 %).
Au rythme actuel, les réserves mondiales pour ces énergies seront quasiment épui-
sées d’ici un siècle. En outre, pour espérer ne serait-ce que contenir le changement
climatique, l’essentiel de ces réserves devra rester dans le sous-sol.
L’utilisation de ces énergies non renouvelables est également responsable de la
pollution atmosphérique aux particules fines qui provoque chaque année des
centaines de milliers de décès prématurés dans le monde. À cela s’ajoutent les dan-
gers reconnus de l’énergie nucléaire : le risque d’accident majeur, devenu incontes-
table depuis les accidents de Three Miles Island, de Tchernobyl et de Fukushima,
ainsi que l’accumulation de déchets nucléaires pour lesquels aucune solution
n’existe à ce jour.
Enfin, la plupart des conflits de l’époque moderne (Afghanistan, Proche-Orient,
Afrique sub-saharienne) ont à leur source des problèmes d’approvisionnement
énergétique, à la base des intérêts géopolitiques d’un monde multipolaire. La
raréfaction des ressources ne fera qu’accroître dramatiquement l’intensité de ces
conflits si l’énergie continue à être produite à partir de ressources non renouve-
lables et dont les sources sont concentrées dans certaines régions du monde.
7. Ce diagnostic est partagé et certains engagements ont été pris par les États dans
le cadre des négociations internationales sur le climat (protocole de Kyoto de 1997,
COP 21…). Mais la mise en œuvre de mesures concrètes ne suit pas. Et surtout, ces
engagements concernent principalement la limitation des émissions de CO2, alors
que c’est l’ensemble de notre rapport à l’énergie qui doit changer si nous voulons
surmonter la crise actuelle.
ÉLECTRIQUE ET NUCLÉAIRE, LES SOURCES
DE L’IMMOBILISME DE LA FRANCE
La situation énergétique de la France se caractérise par un recours
quasi absolu à l’électricité, énergie elle-même basée pour plus de
75 % sur la production nucléaire. Cette stratégie assimilable à du
« tout électrique, tout nucléaire » est loin de garantir l’indépendance
énergétique, puisque la totalité de l’uranium est importée et extraite
dans des conditions contestables. Elle a également pour effet de
freiner la transition vers les énergies renouvelables, et a entraîné un
retard incontestable par rapport à nos voisins européens.
Le secteur résidentiel et tertiaire, qui représente plus de 40 % de
l’énergie consommée en France, reste dominé par l’électrique.
Dans le secteur des transports (30 % de l’énergie), la part du diesel
reste prépondérante malgré une baisse sensible. Les véhicules die-
sel représentent encore 52 % des ventes en 2016… contre près de
1 % seulement pour les véhicules électriques.
7
8. 8
Notre constat : l’urgence climatique est énergétique
Dans note pays, le manque de volonté politique pour s’engager vers la transi-
tion énergétique est manifeste : le débat organisé sur l’énergie à l’occasion de la
loi de transition énergétique pour la croissance verte (LTECV) n’a pas permis une
confrontation de scénarios, le service public ayant disparu au profit d’acteurs pri-
vés pratiquant un lobbying actif.
Les engagements des gouvernements précédents et actuels (Grenelle de l’Envi-
ronnement, LTECV…) n’ont ni remis en cause les dogmes énergétiques passés ni
donné de moyens pour leur réalisation. On peut ici penser à l’objectif de réduction
de la part du nucléaire à 50 % d’ici 2025 et à la promesse, maintes fois réitérée,
de la fermeture de la centrale de Fessenheim. Mais ils n’ont jamais été concrétisés,
l’État laissant EDF maintenir sa capacité nucléaire, voire l’augmenter, et ce, à des
coûts faramineux.
Par ailleurs, la loi LTECV n’acte pas – loin s’en faut – la sortie du diesel et le dévelop-
pement des véhicules électriques ou au biocarburant. Certes, elle fixe des objectifs
relatifs aux travaux d’isolation nécessaires à la réduction de la consommation liée
au chauffage. Mais là encore, elle ne donne pas de moyens de mise en œuvre et
continue à viser un objectif de croissance en tant que tel. Même habillée de vert,
cette croissance est incompatible avec la réduction annoncée, et nécessaire, de
la consommation énergétique.
La politique énergétique des dernières années n’encourage ni la recherche ni
les initiatives innovantes dans le domaine de l’énergie. Cette absence d’inves-
tissement se fait au détriment de la mise en place d’une filière française du pho-
tovoltaïque et de l’éolien, tout en accordant un soutien irresponsable et coûteux
aux projets absurdes, comme la poursuite de la construction de l’EPR (réacteur
nucléaire de troisième génération).
10. 10
Notre projet : l’énergie, pilier de la planification écologique
D
epuis plusieurs
années, des stratégies
de transition sont
élaborées par des équipes
de scientifiques notamment.
Elles se basent à la fois
sur une forte baisse de la
consommation – sans perte
de qualité d’usage – et
sur un recours massif aux
énergies renouvelables. Ces
trajectoires de transition
s’appuient sur des
technologies existantes pour
la plupart, ou en voie de
l’être.
11. Des scénarios démontrent qu’une production de 100 % d’énergies renouvelables
à l’horizon 2050 est possible. C’est le cas du scénario Négawatt pour l’ensemble
du secteur énergétique et dans un système totalement indépendant, c’est-à-dire
sans échange avec les autres pays. L’ADEME (Agence de l’Environnement et de la
Maîtrise de l’Énergie) propose également un mix 100 % renouvelable pour le sec-
teur électrique à horizon 2050.
Ces solutions menant à une véritable transition énergétique peuvent ainsi être
déployées rapidement, à l’échelle d’une génération, et à grande échelle, dès lors
qu’elles sont portées par une détermination politique.
La France insoumise affirme non seulement sa volonté de réaliser la nécessaire
et urgente transition énergétique mais entend surtout s’en donner pleinement les
moyens :
• en faisant de l’énergie un bien commun et en remettant ce secteur essentiel au
service de l’intérêt général ;
• en garantissant le débat démocratique sur les choix énergétiques, en particu-
lier par la création d’un pôle public de l’énergie basé sur la renationalisation des
compagnies énergétiques (électricité, gaz, pétrole) en lien avec des coopératives
locales de production et de consommation d’énergies renouvelables ;
• en s’orientant vers un mix électrique 100 % renouvelable à l’horizon 2050, sur
la base d’une planification donnant la priorité aux mesures de réduction de la
consommation d’énergie – remettant en cause notre modèle productiviste – et
au développement des filières d’énergie renouvelable ;
• en rendant effectif le droit à l’énergie par l’accès gratuit aux usages de pre-
mière nécessité.
11
13. P
our viser l’efficacité,
notre pays doit rattraper
au plus vite son retard
en matière de politique
d’isolation des bâtiments, en
commençant par les bâtiments
publics et l’habitat social. En
parallèle, les alternatives au
chauffage électrique et aux
combustibles fossiles doivent
être généralisées.
13
14. LES MESURES D’URGENCE :
• Arrêter les subventions aux énergies fossiles.
• Taxer le transport de marchandises par la route et l’aérien, par l’introduction
d’une contribution carbone, et développer le ferroutage.
• Rendre gratuits les transports collectifs urbains pour les moins de 18 ans et
les personnes sans emploi.
• Mettre en œuvre la sortie totale du nucléaire en commençant par l’arrêt de
la centrale de Fessenheim en garantissant l’emploi des salariés et leur forma-
tion pour en faire un site pilote du démantèlement et l’abandon de l’opération
du grand carénage visant à prolonger la vie des centrales nucléaires au-delà
de quarante ans.
• Abandonner le projet d’EPR de Flamanville et d’enfouissement des déchets
nucléaires à Bure.
• Interdire l’exploitation du gaz de schiste et du pétrole de schiste et de houille.
• Mettre en place des schémas énergétiques au niveau national, régional
et local.
• Garantir l’accès à l’énergie domestique (chauffage, cuisson…) pour les plus
précaires et mettre en place une tarification progressive incitant aux écono-
mies d’énergie.
• Créer un pôle public de l’énergie pour mener une politique cohérente, en
renationalisant EDF et Engie (ex-GDF) en lien avec des coopératives locales de
production et de consommation d’énergies renouvelables et en favorisant l’auto-
production et le partage des excédents.
• Soutenir les recherches et innovations sur les énergies les plus propres.
Nos propositions : faire la transition énergétique
14
15. 1
Créer un pôle public et
réguler les prix
L’énergie est un bien commun. Son accaparement par des intérêts privés conduit
à une dégradation du système, à un surcoût pour les usagers et à une perte de
contrôle par la puissance publique de la politique énergétique. La planification
écologique passe ainsi par la création d’un pôle public de l’énergie.
Nous reviendrons donc sur la libéralisation du secteur énergétique en abro-
geant la loi NOME (Nouvelle Organisation du Marché de l’Électricité), tout en évitant
les écueils des anciens monopoles publics. Il s’agira en particulier d’intégrer des
formes de décentralisation et de garantir le contrôle citoyen aux différents niveaux
de prise de décision.
Ce retour dans le secteur public permettra également d’offrir les mêmes garan-
ties aux salarié·e·s de l’énergie, en étendant le statut des industries électriques et
gazières à tou·te·s, afin que la transition énergétique ne se traduise pas par une
précarisation de l’emploi.
Plus généralement, le prix de l’énergie ne peut être déterminé par le marché. Il
doit bénéficier d’une garantie de stabilité dans le temps et répondre à des objectifs
politiques complexes tels que la péréquation tarifaire, l’incitation aux économies
d’énergie, l’accès à tou·te·s à l’énergie, le financement de filières moins polluantes,
etc. Ce doit donc être un tarif défini par la représentation nationale.
15
16. 2
Garantir le droit à
l’énergie
L’énergie fait partie des besoins fondamentaux. Les dispositifs actuels n’en per-
mettent pas l’accès effectif à tou·te·s parce qu’ils sont trop limités et nécessitent
des démarches stigmatisantes que nombre de citoyen·ne·s refusent.
Tout comme la santé, l’éducation ou l’eau potable, l’accès à l’énergie pour les
besoins de première nécessité et indispensables à une vie digne doit être gratuit
pour tous, sans condition de ressources. En outre, une tarification progressive
doit permettre de pénaliser les mésusages et les gaspillages de l’énergie, dans un
objectif global de réduction de la consommation.
16
Nos propositions : faire la transition énergétique
17. 3
Réduire
la consommation
d’énergie par
l’isolation thermique
L’énergie la moins polluante est celle que nous ne consommons pas. Les gise-
ments d’économie d’énergie sont importants : relocalisation de l’économie pour
éviter les coûts de transport de marchandises, développement du transport col-
lectif, isolation des bâtiments, etc.
Il est possible, et le scénario Négawatt le montre, d’arriver à une baisse de 65 % de
la consommation d’ici 2050 sans perte de service ou de qualité. Pour atteindre
ces objectifs ambitieux, les travaux devront être pris en charge par l’État, rendant
l’opération insensible en termes de coûts pour l’usager. Le plan d’investissement
de 100 milliards du début de mandat vise ainsi l’isolation thermique de 700 000
logements pour 20 milliards d’euros. L’investissement public permettra de lever
tous les freins à l’isolation et de planifier les travaux à mener.
Le secteur agro-industriel est l’un des responsables principaux de la production
de gaz à effet de serre (agrochimie, transports de denrées, etc.). L’agroécologie
offre un éventail de solutions qui contribueront à réduire ces consommations éner-
gétiques et la nocivité des productions (voir le livret « Pour une agriculture écolo-
gique et paysanne » dans la même collection).
17
18. 4
Sortir des énergies
fossiles et nucléaires
Dans le secteur électrique, la sortie des énergies fossiles et du nucléaire sera
rendue possible par la baisse de la consommation, le développement des éner-
gies renouvelables, le soutien aux infrastructures de réseaux et l’investissement
dans les innovations énergétiques (« smart grids », stockage…). Ces différents
leviers garantiront une transition énergétique effective, au plus proche des terri-
toires et des citoyen·ne·s, tout en assurant la péréquation nationale et la création
de nouvelles filières industrielles durables.
Dans les transports, le développement des transports collectifs électriques, des
modes de déplacement « doux » (vélo et marche) sera associé au développement
de carburants alternatifs (électricité, gaz de synthèse…) pouvant utilement rempla-
cer leurs homologues fossiles.
Le « tout nucléaire » est une impasse : minerai importé, fragilité technologique,
risques d’accident, problème des déchets… Cette source d’énergie doit donc être
abandonnée. Pour autant, le parc nucléaire ne pourra fermer du jour au lendemain.
Celui-ci doit être exploité dans des conditions optimales de sécurité jusqu’à la fer-
meture des centrales, ce qui implique notamment la limitation stricte du recours à la
sous-traitance pour les activités ne pouvant être ré-internalisées. L’ensemble des
personnels de la filière seront assurés de conserver leur emploi, dans l’objec-
tif d’assurer un haut niveau de compétence dans le démantèlement des centrales.
Enfin, pour permettre un débat public éclairé, seront rendues publiques les don-
nées sur l’enfouissement des déchets nucléaires depuis soixante ans afin d’in-
former sur les dangers sanitaires avérés ou éventuels.
Nos propositions : faire la transition énergétique
18
19. 5
Intégrer l’énergie
dans les choix
d’aménagement
Nous veillerons à ce que les outils de planification énergétique à l’échelle natio-
nale et territoriale, respectent l’obligation de prise en compte de l’énergie dans
les schémas d’aménagement du territoire.
L’État devra montrer l’exemple, par exemple en intégrant une évaluation systéma-
tique de l’impact énergétique et en CO2 de la commande publique, et en lan-
çant un grand chantier de rénovation des bâtiments publics.
Dans le cadre de l’application de la règle verte (se reporter au livret thématique
dédié dans la même collection), le critère de minimisation de l’impact écologique
ne devra pas être sacrifié au prétexte de rentabilité économique à court terme
dans le choix des filières.
Les projets publics débattus démocratiquement feront l’objet d’un contrat de ser-
vice public, déclinant des objectifs précis et des statistiques de suivi.
Un investissement dans la recherche publique sur ce secteur facilitera la sor-
tie du nucléaire et des énergies fossiles. Cette attitude ouverte permettra de
se libérer des intérêts privés de rentabilité à court terme, vis-à-vis des avan-
cées technologiques.
La mise en place d’un groupe d’expert·e·s indépendant·e·s, permettant d’éta-
blir les avantages et inconvénients de chaque filière et la faisabilité des scénarios,
aidera à la prise en main démocratique de la politique énergétique.
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20. Retrouvez toutes les informations
sur le programme l’Avenir en commun
sur www.jlm2017.fr
Les livrets de la France insoumise | #15 Énergie
100%
ÉNERGIES RENOUVELABLES
Réalisation:PellicamSN•ImpressionRCSB622053189•Nepasjetersurlavoiepublique
Les livrets de la France insoumise complètent L’Avenir
en commun, le programme de la France insoumise et
de son candidat Jean-Luc Mélenchon.
L’Avenir en commun n’a de sens que si nous le construisons ensemble
au cours d’un processus collectif de débats.
La collection des « Livrets de la France insoumise » offre cet espace
d’échanges pour enrichir le programme en continu.
Les livrets abordent une variété́ de sujets qui donneront à la France
son nouveau visage et l’inscriront différemment dans le monde. On
peut gouverner autrement le pays si l’on se tourne vers le peuple.
Chaque livret expose les enjeux du sujet et dessine les perspectives
d’une révolution citoyenne dont notre pays a tant besoin. Chaque
livret présente aussi les mesures nécessaires pour y arriver. Le tout
sera à chaque fois le fruit d’un travail collectif et coordonné.
Le programme L’Avenir en commun est élaboré sous la direction de Charlotte Girard,
juriste et Jacques Généreux, économiste.
La collection des « Livrets de la France insoumise » est coordonnée par Laurent
Levard, agroéconomiste et Danièle Obono, chercheuse en anthropologie sociale.
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