Le féminisme, revendication sociale ou projet de société ?

Avec les contributions de Nicole-Édith Thevenin, philosophe et psychanalyste, Marie Allibert porte-parole d’Osez le féminisme !, Laurence Cohen, coresponsable de la commission droits des femmes et féminisme du PCF, sénatrice du Val-de-Marne et Geneviève Fraisse, philosophe.

 

Rappel des faits. Le mouvement de lutte, de revendication pour les droits des femmes et d’émancipation humaine interroge l’ordre, les choix et les pouvoirs établis.

  • Une révolution féministe qui essaime

par Laurence Cohen, coresponsable de la commission droits des femmes et féminisme du PCF, sénatrice du Val-de-Marne

Laurence CohenCoresponsable de la commission droits des femmes et féminisme du PCF, sénatrice du Val-de-MarneEn 2017, l’égalité entre les femmes et les hommes n’existe dans aucun pays. Les luttes des féministes ont permis de faire bouger les choses et les conquêtes sont loin d’être négligeables. Mais naître femme entraîne une propension à ce que nos devoirs soient plus nombreux que nos droits ! Dès lors, ne convient-il pas de s’interroger sur cette injustice qui perdure au fil des siècles ? Pourquoi un tel acharnement ? Si l’égalité bouscule tant nos schémas de société, c’est que, précisément, nous ne souhaitons pas la faire entrer dans ces schémas. Revendiquer l’égalité c’est, non pas nous « hisser » au même statut que les hommes, mais modifier les statuts tels qu’ils existent aujourd’hui. L’égalité, par essence, n’accepte aucune domination, aucune soumission, aucune exploitation. L’émancipation des femmes est avant tout une émancipation humaine. En ce sens, chacune de nos revendications sociales est à même de déstabiliser l’ordre établi pour ouvrir vers la transformation profonde de la société. Les communistes défendent un féminisme-lutte de classes, qui repose sur le fait que l’oppression de classe est sexuée et que les personnes plus exploitées sont des femmes. Le patriarcat traverse les structures de classes. L’analyse de l’organisation du travail démontre que les femmes subissent la reproduction du partage traditionnel des rôles comme dans la sphère privée. Vouloir s’attaquer, pour ne prendre qu’un exemple, aux temps partiels imposés, vécus majoritairement par les femmes, permettrait non seulement d’améliorer les conditions de travail des femmes mais révolutionnerait le travail de tous. Et les conséquences ne s’arrêteraient pas aux portes des entreprises mais remettraient en cause l’organisation même de l’État social. Je pense notamment au développement et à l’amélioration des services publics, notamment ceux concernant l’accueil de la petite enfance ou l’accompagnement à la personne.

Chaque droit gagné pour les femmes permet donc non seulement de faire évoluer les conditions de travail de tous mais également de mieux articuler les temps sociaux.

Ce n’est pas un hasard si partout dans le monde les droits des femmes sont attaqués. Cette montée des forces réactionnaires, rétrogrades, des fondamentalistes de toutes religions, vise la liberté des femmes pour empêcher toute émancipation humaine. C’est révélateur de la peur qu’éprouvent les dirigeants face à une révolution féministe qui germe et qui essaime.


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