Les États... unis contre la cybercriminalité

Pour mieux lutter contre les menaces criminelles ou terroristes sur le Net, les gouvernements multiplient les coopérations. Interview.

Propos recueillis par

Alexander Seger est chef de la division cybercriminalité du Conseil de l’Europe.
Alexander Seger est chef de la division cybercriminalité du Conseil de l’Europe. © Le Point.fr

Temps de lecture : 4 min

La convention de Budapest sur la cybercriminalité fête ses quinze ans en 2016. À cette occasion, une conférence se tient du 16 au 18 novembre à Strasbourg. Alexander Seger, chef de la division cybercriminalité du Conseil de l'Europe, sous l'égide duquel se tient cette réunion, revient sur les résultats obtenus jusque-là en matière de coopération internationale. Mais aussi sur les défis qui restent à relever.

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Le Point.fr : Combien de pays sont aujourd'hui partie prenante à la convention de Budapest de 2001 ?

Alexander Seger : 67 États. Une cinquantaine d'entre eux ont directement ratifié la convention de Budapest. Le dernier à l'avoir fait est la principauté d'Andorre. Les autres sont observateurs mais se sont formellement engagés à la respecter. Cela dépasse largement les frontières de l'Europe puisque les États-Unis, le Canada, le Japon, l'Australie, la République dominicaine, l'île Maurice, le Sri Lanka et (bientôt) même les îles Tonga en font partie. J'ajouterai que plus de 70 pays supplémentaires ont pris la convention comme source d'inspiration pour élaborer leur législation interne.

Que prévoit précisément cette convention sur la cybercriminalité ?

Ce texte est à ce jour le premier et le seul traité international sur la question. Il vise à lutter plus efficacement contre les délits informatiques : ceux commis sur Internet ou qui ont utilisé des outils numériques. Qu'il s'agisse d'infractions portant atteinte aux droits d'auteurs, de la fraude liée à l'informatique, de la pornographie enfantine ou encore des infractions liées à la sécurité des réseaux. Le principal objectif du traité, énoncé dans son préambule, est de poursuivre "une politique pénale commune destinée à protéger la société contre le cybercrime, notamment par l'adoption d'une législation appropriée et la stimulation de la coopération internationale". Cette convention encourage ainsi les États signataires à adopter des réglementations susceptibles d'améliorer les techniques d'enquêtes et à s'entraider contre une menace qui dépasse de très loin les frontières étatiques traditionnelles. La convention contient également une série de pouvoirs de procédures, tels que la perquisition de réseaux informatiques et l'interception.

À quelle régularité se réunissent les représentants des États concernés ?

Le comité de la convention se réunit très régulièrement. Nous organisons, par ailleurs, une conférence (surnommée Octopus, NDLR) tous les 18 mois à Strasbourg. Celle du 16 au 18 novembre rassemble 300 personnes, dont une majorité de policiers et de magistrats, issues de près de 90 pays. Des ateliers thématiques leur permettent d'échanger. Nous avons des activités de coopération - du « capacity building » - plus régulièrement. Je dirais entre trois et quatre par mois. Pour cela, notre division dispose de bureaux à Bucarest à partir desquels nous organisons des formations à destination de juges ou de formateurs de juges pour leur permettre de mieux prendre en compte les enjeux cyber.

Un nouveau round de négociations a débuté en 2014. De quoi s'agit-il ?

Nous essayons depuis plusieurs années de trouver des solutions au problème lié à l'hébergement de preuves électroniques dans le « cloud » sous des juridictions étrangères, multiples ou inconnues. En juin 2013, nous sommes parvenus à un accord de principe pour avancer dans la négociation d'un protocole additionnel à la convention de Budapest. Mais avec les rapports sur la surveillance de masse (révélés par Edward Snowden, NDLR) depuis le 6 juin 2013, le contexte politique a changé et il n'y a pas eu de soutien suffisant pour aller de l'avant. Mais si j'essaie d'être positif, je dirai que cela nous a conduit à clarifier notre position. Notre objectif est de veiller à faciliter l'accès à des preuves numériques dans le strict cadre d'affaires criminelles. Cela n'a rien à voir avec la surveillance de masse. Cela nous oblige au contraire à réaffirmer que nous prenons en compte la nécessaire protection des données individuelles.

Où en est-on aujourd'hui de l'avancée de ces négociations ?

Nous avons bien avancé. Le comité de la convention a discuté, le 15 novembre, cinq recommandations visant à rendre plus efficace la coopération judiciaire entre les signataires de la convention. Certaines ont été validées, d'autres exigent de nouvelles consultations entre les parties. Nous allons poursuivre et espérons déboucher sur un protocole additionnel au traité, en juin 2017. Nous espérons que ce nouveau texte permettra d'apporter des réponses à des questions simples : à qui un magistrat doit-il envoyer une commission rogatoire si un serveur héberge (en dehors de sa juridiction, NDLR) des données susceptibles d'aider à élucider une affaire criminelle ? Et quels éléments précis peut-il glaner pour sanctionner les auteurs d'un crime ? Et cela ne se cantonne pas à la simple question du terrorisme !

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