ÉCOTAXE - Le dispositif de l'écotaxe sera remplacé d'ici au 1er janvier 2015 par un "péage de transit poids lourds" concernant les camions de plus de 3,5 tonnes et 4000 kilomètres de routes au lieu des 15.000 initialement prévus, affirme le quotidien régional Ouest France dans son édition de dimanche 22 juin.
Dans l'Ouest, où la fronde des "Bonnets rouges" avait conduit le gouvernement à suspendre l'écotaxe à l'automne dernier, seul l'axe Saint-Lô/Nantes via Rennes sera concerné par le nouveau péage, précise le journal qui cite des sources au ministère de l'Ecologie et publie une carte du nouveau dispositif. La ministre de l'Ecologie et de l'Energie Ségolène Royal a annoncé mercredi que le gouvernement rendrait "la semaine prochaine" sa décision concernant l'écotaxe poids lourds.
Mais suite à l'article de Ouest France, Matignon a préféré ne pas attendre et a confirmé la mise en place de ce dispositif. Le nouveau dispositif et le nouveau réseau seront traduits dans un amendement au projet de loi de finances rectificative 2014, dont l'examen débute lundi à l'Assemblée nationale. La recette brute attendue serait de l'ordre de 550 à 560 millions d'euros, affectés à l'agence de financement des infrastructures de transport de France (Afitf). Pour la mise en oeuvre du nouveau dispositif, le contrat avec la société Ecomouv, qui a été suspendu, va être "rediscuté sur ces nouvelles bases", selon une source proche de Matignon.
Une discussion qui a visiblement porté ses fruits assez vite. Ecomouv, détenue à 70% par le groupe italien Atlantia, a signé avec le gouvernement français un protocole d'accord mettant fin au conflit qui les opposait depuis la suspension par ce dernier de l'écotaxe en octobre 2013, a annoncé lundi 23 juin Atlantia. L'accord "résout le contentieux complexe survenu le 29 octobre 2013 suite à la décision du gouvernement de repousser l'introduction de l'écotaxe", initialement prévue le 1er janvier 2014, a expliqué Atlantia dans un commniqué.
Dans cet accord, "le gouvernement français reconnaît la conformité au contrat du dispositif développé par Ecomouv" et se reconnaît "débiteur" de la société, laquelle se voit par ailleurs exemptée de tous les coûts opérationnels et financiers liés à la décision de suspendre l'écotaxe, indique le groupe. La signature de l'accord "fait suite à l'avis rendu par la commission de conciliation et aux conclusions des rapports parlementaires sur l'écotaxe", précise Atlantia.
Une commission d'enquête sénatoriale avait estimé mercredi que le contrat avec Ecomouv avait été conclu de façon régulière, tout en relevant que la suspension de l'écotaxe était une décision purement politique et "sans fondement juridique".
L'Etat va-t-il entrer au capital?
Devrait désormais s'ouvrir "une phase de renégociation du contrat", a-t-on précisé de source proche du dossier. Cette nouvelle étape devrait "démarrer très vite" car un nouveau dispositif doit entrer en vigueur au 1er janvier 2015 et qu'il faut compter environ 3 mois de préparatifs, a-t-on ajouté.
Ecomouv' dont le reste du capital est partagé entre Thales, SNCF, SFR, et Steria - avait été créée spécialement pour développer l'ensemble du dispositif et gérer la collecte de la taxe, décidée par le précédent gouvernement français et lancée en octobre 2011. La société est chargée du financement, de la conception, de la réalisation, de l'entretien, de l'exploitation et de la maintenance de l'ensemble du dispositif.
Dimanche, Manuel Valls avait évoqué l'idée d'une entrée de l'Etat au capital d'Ecomouv, afin "d'assurer un meilleur contrôle" selon le Premier ministre. "Pour la mise en oeuvre du péage de transit, il sera fait appel à la société Ecomouv dont l'infrastructure technique et opérationnelle existe déjà, et qui fera l'objet d'avenants" au contrat, avait expliqué Manuel Valls dans un discours lors d'un déplacement politique à Trèbes (Aude).
"Afin d'assurer un meilleur contrôle, le gouvernement engagera des discussions avec Ecomouv qui pourront aller jusqu'à une montée au capital de la société par la puissance publique", avait-il dit, confirmant des éléments donnés de source proche de Matignon.
Pour Duflot, le gouvernement a "tout faux"
Selon Ouest-France, le nouveau dispositif retient les axes de grand transit enregistrant un trafic "supérieur à 2500 poids lourds par jour", épargnant les trajets courts et la Bretagne à l'ouest de Rennes. "Cela correspond aux grands itinéraires traversant le pays sans péage et à des axes parallèles aux autoroutes payantes comme la RN4 entre Paris et l'Est de la France et la RN10 entre Bordeaux et Poitiers", précise une source au ministère de l'écologie, citée par le quotidien.
Les véhicules et le matériel agricole ainsi que les véhicules dédiés à la collecte du lait et les véhicules forains et de cirque sont exonérés du péage. "Les camions devront être équipés d'un GPS qui calculera le nombre de km parcourus et facturera en conséquence", ajoute le quotidien. Le barème repose sur un taux moyen de 13 centimes d'euro par km modulable en fonction des kilomètres parcourus, du niveau de pollution et du nombre d'essieux des camions.Trois mois de rodage technique sont prévus avant l'entrée en vigueur du nouveau dispositif, prévu le 1er janvier 2015.
Ce nouveau dispositif ne semble pas plaire à Cécile Duflot. L'ex-ministre et députée EELV a en effet écrit sur Twitter ce qu'elle pensait de ces nouvelles mesures:
L'écotaxe poids lourds devait être appliquée dès 2011, mais cette date n'a cessé d'être repoussée pour des raisons techniques. L'ancien Premier ministre Jean-Marc Ayrault a fini en octobre dernier par annoncer sa suspension face au mouvement d'opposition venu de Bretagne, qui a fait tache d'huile dans d'autres régions.
A son arrivée à la tête du ministère de l'Ecologie en avril, Ségolène Royal avait plaidé pour une "remise à plat" de l'écotaxe, dans l'attente des conclusions de la mission parlementaire sur le sujet.