CRASH - Quelles règles pour le survol des zones de conflit? Peut-on confondre avions civil et militaire? Quel type d'armement a pu abattre l'appareil qui assurait le vol MH 17? Les questions sont multiples au lendemain de la destruction en vol en Ukraine d'un Boeing de Malaysia Airlines.
Les circonstances exceptionnelles de ce drame semble effectivement irréelles... et lourdes de conséquences potentielles. Quelques réponses:
Il n'y a pas de règle gravée dans le marbre. Au premier chef, chaque pays est maître de fermer tout ou partie de son espace aérien, explique la Direction générale de l'aviation civile (DGAC) française.
Au niveau européen, Eurocontrol, gestionnaire de l'espace aérien, et l'Agence européenne de sécurité aérienne (AESA) peuvent aussi interdire ou recommander d'éviter un survol. A l'échelle mondiale, l'Organisation de l'aviation civile internationale (OACI) peut faire de même.
Le survol d'une région peut par ailleurs être interdit en-dessous d'une certaine altitude. Selon Eurocontrol, c'était le cas pour l'itinéraire en l'Ukraine emprunté par le Boeing 777 de Malaysian Airlines. Lorsqu'il a disparu des écrans des radars, l'avion volait à environ 10.000 mètres d'altitude, un niveau supérieur de 250 m au seuil autorisé.
La décision ultime revient aux compagnies et à leurs pilotes.
Commandant de bord et porte-parole des opérations aériennes d'Air France, Paul Thévenon-Rousseau cite le cas de la Syrie : "Air France a fait le choix de ne plus desservir Damas, mais pourrait tout à fait le faire". "Le pilote est seul décideur de la route, du niveau de vol, et du niveau de carburant". Il peut choisir de se dérouter pour des raisons, tant géopolitiques que météorologiques.
Des compagnies asiatiques (Korean Air, Asiana, China Airlines) ou l'Australienne Qantas avaient d'ailleurs modifié dès mars leurs trajets pour éviter l'Ukraine. En Europe en revanche, Air France et Lufthansa, comme d'autres, avaient maintenu leurs itinéraires.
"Il y a le principe de précaution qui veut qu'on ne traverse pas des foyers de tensions, surtout lorsqu'on sait que les belligérants peuvent être équipés de systèmes extrêmement sophistiqués", relève néanmoins Loïc Tribot La Spière, analyste en matière de défense et délégué général du Centre d'étude et de prospective stratégique.
Les experts sont divisés. Yves Barillé, porte-parole du fabricant européen de missiles MBDA, juge impossible une telle confusion : "tout avion volant dans l'espace aérien est identifié par son transpondeur - un système qui permet de diffuser un code signalant si c'est un avion civil ou militaire" et à quelle compagnie il appartient.
"Tout dépend du type d'avion", nuance Philippe Migault, directeur de recherche à l'IRIS. "On ne peut pas confondre un Antonov 26 avec un Boeing 777, c'est absolument impossible. Ca vole deux fois moins vite et deux fois moins haut. En revanche, un Iliouchine 76, on pourrait éventuellement".
Chercheur au Royal United Services (RUSI) de Londres, Igor Soutiaguine plaide pour une telle hypothèse. Selon lui, le pilote de l'appareil assurant le vol MH17 "a dévié de sa route, un peu plus au sud, où un avion militaire ukrainien était en vol à cette heure précise". L'appareil, un IL-76, "est approximativement de la taille d'un Boeing. Il est très lourd, très gros et, sur un écran radar, le signal envoyé serait à peu près le même".
Tous les spécialistes s'accordent sur le fait que le missile probablement à l'origine de la tragédie était d'un modèle sophistiqué."Ca ne peut être ni un système léger ni un système portable, c'est forcément un système très sophistiqué", estime Yves Barillé.
"Un avion civil volant à environ 30.000 pieds (10.000 mètres) serait très au-delà de la portée de tir d'un système portable, qui peut toucher des cibles allant jusqu'à 10.000 pieds", explique Doug Richardson, rédacteur en chef du magazine Jane's Missiles and Rocket.
Comme beaucoup, il évoque plutôt l'hypothèse d'un missile Bouk, système mobile sol-air russe dont disposait l'armée ukrainienne.
"C'est un missile qui a un plafond d'intervention dépassant les 20 kilomètres d'altitude (...) Les séparatistes avaient revendiqué la prise d'une batterie de missiles Bouk il y a une semaine, dix jours. Donc, ils venaient juste de s'emparer de systèmes Bouk", souligne Philippe Migault.
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