MUSIQUE - "Il faut maintenant mettre fin à la double nationalité" et "arrêter l'immigration", a déclaré Marine Le Pen dimanche 29 juin en réaction aux incidents qui ont suivi la qualification de l'Algérie pour les 8e de finale du Mondial de football, dans la nuit de jeudi à vendredi 27 mai.
Lors du Grand Rendez-vous (Europe 1, i>TELE, Le Monde) la présidente du Front national a vu dans ces incidents et dans les précautions policières prévues pour la rencontre Algérie-Allemagne, lundi, "la démonstration de l'échec total de la politique de l'immigration et le refus exprimé, par un certain nombre de binationaux de l'assimilation". "Il faut choisir, être français ou être autre chose", a-t-elle ajouté.
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La suppression de la double nationalité, une rengaine au Front national. Elle figurait déjà au programme de Jean-Marie Le Pen, le père de l'actuel président du parti d'extrême droite, lors de la campagne présidentielle de 2007 :
Il l'avait expliqué sur TV5 Monde :
Au mois de mai de la même année, il avait évoqué la garde des Sceaux de l'époque, Rachida Dati, née en Saône-et-Loire d'une mère algérienne et d'un père marocain: "Le Front national est foncièrement hostile à la double nationalité" et demanderait, s'il était au pouvoir, aux éventuels bi-nationaux "quelle est la nationalité" qu'ils "choisissent (…). Par exemple, il poserait la question à Rachida Dati: est-ce que vous avez la nationalité marocaine, ou est-ce que vous avez la nationalité française (…) ? Vous devez choisir. Si vous choisissez la nationalité étrangère, vous serez des étrangers, respectés en France, mais selon le statut des étrangers", sans les avantages "que moi je crois devoir réserver aux Français".
En 1989, Jean-Marie Le Pen avait vivement interpellé sur sa nationalité Lionel Stoléru, alors député apparenté PS, ancien Secrétaire d'État chargé des travailleurs manuels et immigrés du gouvernement de Raymond Barre (entre 1978 et 1981).
Regardez l'échange entre les deux hommes :
20 ans plus tard, c'est à Rama Yade, née à Dakar au Sénégal, alors Secrétaire d'État du gouvernement de François Fillon, que Marine Le Pen reprochait ses origines: "Comment voulez-vous demander à ces jeunes de choisir quand la secrétaire d'Etat, Mme Rama Yade, déclare dans son livre: 'jusqu'à 18 ans, s'il y avait eu une guerre entre le Sénégal et la France, j'aurais choisi le Sénégal. Et depuis, je ne sais pas'".
Elle avait à nouveau évoqué Rama Yade sur le plateau de BFMTV :
La candidate du FN à la présidentielle Marine Le Pen soutenait en 2009 que "la double nationalité avec un certain nombre de pays du Maghreb pose plus de difficultés d'assimilation" qu'avec un pays comme les Etats-Unis. Le Front national proposait alors et propose encore que la double nationalité ne soit plus autorisée qu'avec un autre pays de l’Union européenne.
"Il y a des pays avec lesquels ça pose plus de problèmes que d'autres. On va pas se cacher derrière notre petit doigt (...) on sait très bien que la double nationalité avec un certain nombre de pays du Maghreb pose plus de difficultés d'assimilation que ne pose la double nationalité avec les États-Unis", avait expliqué Marine Le Pen. "Je suis contre la double nationalité, ce qui n'empêche pas d'ailleurs que quelqu'un peut parfaitement venir en France en ayant la nationalité d'un autre pays. Il peut même y vivre, il peut même y rester toute sa vie, il peut même avoir des enfants qui sont Français", avait aussi noté Marine Le Pen.
En 2009, des manifestations de joie marquées par des incidents après la qualification de l'Algérie pour la Coupe du monde 2010 en Afrique du Sud, avaient déjà provoqué les sorties de Marine Le Pen sur le sujet.
Florian Philippot s'en accommode
Plus récemment, le vice-président du Front national, Florian Philippot, s’accommodait de la double nationalité: il souhaitait déchoir de leur nationalité française les bi-nationaux partis faire le jihad en Syrie.
Dans le rapport de la mission d'information parlementaire sur le droit de la nationalité dont il était rapporteur, le député UMP Claude Goasguen proposait en 2009 de "limiter" la double nationalité. Il est "gênant qu'une personne puisse à la fois voter en France et dans un autre Etat, avait-il dit, souhaitant demander aux personnes concernées "de choisir entre deux nationalités, ou qu'on aille vers une limitation des droits politiques". "Comment est-il possible d'avoir une double fidélité, une double appartenance, une double série de droits et de devoirs", interrogeait-il.
Le président de la mission d'information, le député socialiste... Manuel Valls (né à Barcelone, le premier ministre a abandonné la nationalité espagnole en obtenant la française), avait estimé "contre-productif" de vouloir supprimer la binationalité. Nathalie Kosciusko-Morizet avait rappelé dans son livre"Le Front antinational "que certains binationaux ne peuvent pas répudier leur nationalité d'origine".
Dans un communiqué diffusé dimanche, l'association SOS Racisme évoque "un discours haineux et stigmatisant" de Marine Le Pen. En 2012 l'association écrivait :
"Les doubles-nationaux représentent 5 % de la population de France métropolitaine âgée de 18 à 50 ans, dont 90 % sont immigrés ou descendants d'immigrés", indique sur son site internet l'Institut national d'études démographiques (INED).
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