REFORME TERRITORIALE - Aussitôt annoncée, aussitôt contestée. La grande réforme territoriale dévoilée ce lundi 2 juin par François Hollande, qui prévoit notamment le passage de 22 à 14 super-régions, n'a pas laissé grand monde indifférent.
Et pour cause: malgré le statu quo observé en Ile-de-France, Bretagne ou Aquitaine, ce sont sept nouvelles collectivités régionales qui pourraient émerger de ce big bang institutionnel, trois régions (Centre, Limousin et Poitou-Charentes) fusionnant pour ne former qu'une seule et même circonscription. Entre les adversaires, les déçus et les râleurs, les zones de friction ne manquent pas dans la nouvelle carte régionale du quinquennat Hollande.
Revue de détail des mécontentements présents et à venir.
Cette catégorie regroupe des partis politiques pourtant peu habitués à se retrouver sur la même ligne. Le Front national, le Front de Gauche et le Parti radical de gauche, pourtant membre de la majorité présidentielle, ont tous trois affiché leur hostilité à la réforme territoriale. Pour eux, pas question de fusionner des régions et encore moins de supprimer des départements, héritages de la Révolution française.
Les centristes et certains membres de l'UMP s'étaient engagés à défendre la réforme si elle était conforme aux annonces du président de la République. Mais le projet finalement présenté ce lundi est moins ambitieux qu'espéré. Alors que l'exécutif s'était engagé dans un premier temps à réduire le nombre de régions par deux, celui-ci avait finalement rectifié le tir en passant à 12. Finalement, ce sont seulement 14 super-régions qui devraient voir le jour et seule la moitié d'entre elles sont effectivement le fruit de fusions entre plusieurs collectivités.
Même déception chez les partisans d'une suppression immédiate des départements. François Hollande a préféré s'en remettre à une hypothétique réforme constitutionnelle à l'horizon 2020. L'UMP veut aller plus vite en convoquant un référendum qui permettrait de dépasser les clivages parlementaires.
Hostiles à toute fusion avec une autre région mais favorable à une absorption du département de Loire-Atlantique, la Bretagne n'aura finalement obtenu gain de cause qu'à moitié. La région Pays de la Loire ne sera pas rattachée au Poitou-Charentes mais elle se retrouve isolée sans partenaire régional. De son côté, l'ancien premier ministre Jean-Marc Ayrault s'était prononcé en faveur d'une fusion des régions Pays de la Loire et Bretagne. En vain.
Le choix de garder séparées les deux métropoles bretonnes Rennes et Nantes rencontrera notamment l'hostilité des Bonnets rouges. Le week-end dernier, ceux-ci ont défilé en faveur d'une réunification de la Loire-Atlantique à la Bretagne, ce qui impliquait le découpage de la région Pays de la Loire. Le collectif "44=BZH" a appelé à un rassemblement mardi en fin de journée, après les annonces du président de la République sur la réforme territoriale, en premier lieu devant les préfectures de Brest et Nantes.
"François Hollande fait du François Hollande: une politique du ni-ni. Ni fusion avec la Bretagne, ni constitution d'une grande région arc atlantique Bretagne/Poitou-Charentes/Pays de la Loire", a résumé le patron de la Vendée, l'UMP Bruno Retailleau dans un communiqué.
SI les arbitrages régionaux sont désormais connus, plusieurs questions demeurent aujourd'hui sans réponse. Les noms des futures super-régions n'ont pas été annoncés et pourraient faire l'objet de débats féroces dans les mois et années à venir.
Reste également la question des futures capitales régionales. Pas de souci dans les régions dont les frontières ne bougent pas ou celles, comme la future Rhône-Alpes-Auvergne, où domine une métropole comme Lyon. Mais dans le nouvel ensemble Midi-Pyrénées-Languedoc-Roussillon, la bataille risque de faire rage entre la métropole toulousaine et sa rivale Montpellier.
Anticipant son rattachement, la région Languedoc-Roussillon est d'ores et déjà entrée en résistance. "L’efficacité d’un territoire n’augmente pas forcément s’il devient plus grand. Ce n’est pas mécanique. Je ne lâcherai rien!", prévient son président (PS) Christian Bourquin.
Si son nom semble aller de soi, la future région Alsace-Lorraine risque de se heurter aux antagonismes politiques entre le président socialiste de la Lorraine, Jean-Pierre Masseret, et le patron UMP de l'Alsace, Philippe Richet. L'un est favorable à la création d'une vaste région frontalière tournée vers l'Europe. L'autre dénonce un "fantasme territorial" déconnecté des attentes des populations. Les Alsaciens ont déjà refusé par référendum la fusion des deux départements du Haut et Bas Rhin. La fusion pourrait en outre se heurter aux fortes cultures identitaires présentes dans ces deux territoires.
C'est la plus grande fusion annoncée par François Hollande: le Poitou-Charentes devrait s'unir avec le Limousin et le Centre pour former une vaste super-région reliant l'Atlantique à l'Ile-de-France. Un désaveu pour Ségolène Royal qui avaient envisagé un rapprochement avec les Pays de la Loire. Mais ce scénario est également fortement contesté par les élus UMP de la région dont certains espéraient un rapprochement avec l'Aquitaine.
Le président UMP du Conseil général de la Charente-Maritime, Dominique Bussereau, a indiqué de son côté que les conseils généraux du Poitou-Charentes se retrouveront vendredi pour évoquer la question. Favorable à un rapprochement avec l'Aquitaine, l'ancien ministre proche de Jean-Pierre Raffarin a répété sur Twitter que les habitants seraient consultés dans le cadre d'un référendum d'initiative locale.