Pourquoi les vidéos virales sont-elles virales ?

Tout le monde connaît « Charlie bit my finger ». Cette vidéo de 56 secondes a été vu 373 millions de fois sur YouTube. C’est l’une des plus populaires de la plateforme. Alors qu’elle semble assez anodine, qu’est-ce qui explique son succès, se demande Jonah Lehrer.

Si l’on en croit une étude menée par Jonah Berger, professeur assistant à la Wharton School de l’université de Pennsylvanie, son succès est lié aux émotions viscérales qu’elle suscite auprès des internautes.

Harry et Charlie sont des enfants incroyablement expressifs. En quelques secondes, leurs visages passent de l’agonie au rire. Juste au moment où nous sommes inquiets pour Harry, celui-ci éclate en un large sourire. Le soulagement est palpable, le plaisir contagieux. Pour Jonah Berger, la popularité de ces vidéos est liée à la manière dont elles excitent le corps, induisant un spectre de changements physiologiques. Lorsque nous regardons Harry et Charlie, nous entrons brièvement dans un état de « haute excitation ». Notre rythme cardiaque s’accélère, nos glandes sudoripares s’ouvrent, notre corps se prépare à l’action. Ce sont les mêmes changements physiques qui se produisent lorsque nous rencontrons un contenu fortement émotionnel comme un passage d’un film d’horreur ou une phrase émouvante dans un poème.

Dans son étude Jonah Berger démontre que les gens sont beaucoup plus susceptibles de partager de l’information quand ils sont dans un tel état d’excitation. En demandant à des cobayes de courir sur place pendant une minute – pour déclencher des symptômes similaires à celle de l’excitation -, le nombre de personnes qui partageaient une information avec leurs amis a doublé. En leur montrant des vidéos effrayantes et drôles, il a stimulé le taux de transmission sociale.

Des travaux antérieurs (.pdf) de Jonas Berger se sont intéressés aux 7500 articles qui sont apparus sur la liste des articles les plus envoyés du New York Times entre août 2008 et février 2009. Alors qu’il pensait que les articles les plus partagés seraient d’abord des articles ayant des implications pratiques et immédiates pour les gens, il a découvert que les histoires les plus populaires sont celles qui déclenchent les émotions les plus excitantes, telles que la crainte et la colère. « Nous ne voulons pas partager des faits, nous voulons partager des sentiments », explique Jonah Lehrer.

Le partage d’émotion forte permet de favoriser la connexion aux autres et la solidarité. « Si je suis en colère et que vous êtes en colère, nous pouvons nous retrouver autour de ce que nous ressentons », explique Jonah Berger. L’internet reflète cet instinct social ancien. La seule différence est que lorsque nous sommes en ligne, nous ne pouvons souvent pas exprimer nos émotions directement. « Il est difficile de communiquer des sentiments forts quand nous ne sommes pas en face à face », explique Jonas Berger. « Mais le partage de contenu sur le Web nous permet d’obtenir une sorte de connexion en parallèle. »

« C’est pourquoi le web est souvent peuplé de choses excitantes. Les choses les plus populaires ne sont pas généralement très instructives, mais très émotives. Il y aura toujours une demande insatiable pour les vidéos drôles, les chansons de Justin Bieber ou les colères d’hommes politiques. Des contenus futiles et superficiels, certes, mais qui sont plus un moyen qu’une fin, pour dire aux autres que nous aimerions ressentir la même chose qu’eux », conclut Jonah Lehrer.

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