En cette soirée d’avril, l’antre parisien du music-hall a fait vœu de silence. Sur les vieux fauteuils rouges des Folies-Bergère, 1 700 personnes se laissent porter, yeux fermés, par une voix apaisante. « Prenons le temps de prêter attention à la respiration, à notre souffle qui va et qui vient. » Ni ricanement gêné ni coups d’œil échangés… Le public lâche étonnamment prise. Sur scène, un petit homme grisonnant, mais fringant dans sa chemise blanche, guide les spectateurs dans une méditation.
Lui, c’est Jon Kabat-Zinn. Cet Américain de 71 ans est, depuis trente-cinq ans, le porte-voix de la mindfulness (« pleine conscience »). Chercheur en biologie moléculaire au Massachusetts Institute of Technology, aux Etats-Unis, auteur de dizaines de best-sellers, il a fondé, en 1979, la première Clinique de réduction du stress puis le Centre pour la pleine conscience dans la médecine. Ses recherches ont mené à l’élaboration d’un programme de huit semaines appelé « Mindfulness Based Stress Reduction » (MBSR, réduction du stress fondée sur la pleine conscience), destiné à aider les gens à surmonter anxiété, douleurs et maladies. Pratiqué aujourd’hui dans huit cents centres hospitaliers dans le monde, le MBSR l’est aussi dans des entreprises, des prisons, des écoles.
« Rallumez la lumière ! On n’est pas au spectacle », lance, en riant, Jon Kabat-Zinn, qui a l’art de transformer les conférences en stand-up. La semaine précédente, il était à Bruxelles, celle d’avant aux Pays-Bas ; en janvier, à Davos, il apprenait à une centaine d’hommes d’affaires à cultiver cette fameuse « présence attentive ». « Posez-vous la question : où est mon esprit, là, tout de suite ? Jamais dans l’instant présent ! Toujours à ressasser le passé ou à penser à l’après. »
Le burn-out, un déclic
Plus tôt dans la soirée, sur le trottoir étroit de la rue Richer, on jouait des coudes pour entrer aux Folies-Bergère. « C’est la première fois qu’une conférence affiche complet en quelques jours ! », s’étonne Arnaud de Saint-Simon, directeur de la publication du groupe Psychologies, organisateur de l’événement. Le public ? Beaucoup de femmes, âgées de 30 à 60 ans, venues en « bandes », des couples aussi. La moitié du public ayant déjà pratiqué la méditation. « Mon psychiatre me l’a conseillée à l’hôpital, après un burn-out. » Le surmenage est souvent un déclic. « J’y ai trouvé une manière d’échapper à mes pensées négatives et anxieuses » ; « Ça m’aide avec les enfants » ; « Je gère mieux mon mal de dos chronique »… Très souvent, c’est un psychiatre, un médecin, voire un rhumatologue qui leur a conseillé la méditation. A laquelle tous – ou presque – se sont initiés grâce à un livre.
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